« L’Autre Maison » : un portrait authentique de la maladie d’Alzheimer, avec Roy Dupuis et Marcel Sabourin
L'Alzheimer est une terrible maladie qui touche de plus en plus de personnes. En 2011, la Société Alzheimer estimait le nombre de personnes atteintes à 747 000. Là-dessus, 14,5 % avaient plus de 65 ans. Mathieu Roy, un réalisateur surtout connu pour œuvrer dans le documentaire, s'est inspiré de son histoire personnelle pour imaginer son premier long métrage de fiction, « L'Autre Maison », qui a ouvert le 37e Festival des Films du Monde de Montréal, en août dernier.
Perdre ses repères
Henri Bernard (Marcel Sabourin) va bientôt célébrer son 80e anniversaire. Il vit avec son fils cadet, Éric (Émile Proulx-Cloutier), et la conjointe de ce dernier, Maia (Florence Blain Mbaye), dans une maison située sur le bord d'un lac en forêt. Le vieil homme est en train de perdre la mémoire et semble souffrir d'Alzheimer. À toute heure du jour ou de la nuit, il s'évade à la recherche d'une autre maison, un lieu où il se sentirait enfin chez lui.
Si Éric souhaite continuer de s'occuper de son père malade, Gabriel (Roy Dupuis, que l'on a pu voir dans Cyanure), lui, désire le « placer » dans un centre d'hébergement. Indirectement, Éric l'accuse d'opter pour la solution facile. Il lui reproche en même temps de ne pas souvent être là. Il faut dire que Gabriel est un reporter en zones de guerre qui demeure en Europe et est appelé à visiter différentes régions du monde, ce qui l'empêche de visiter régulièrement son père.
Perdre ses moyens
Dans L'Autre Maison, Mathieu Roy met l'accent sur les conséquences odieuses de cette maladie pour la « victime », mais également pour ses proches. Vivre avec un membre de sa famille qui ne sait même pas qui on est doit, il faut bien l'avouer, être une expérience éprouvante.
Ici, Éric tente du mieux qu'il peut de subvenir aux besoins de son père, mais l'aidant naturel est humain et va finir par craquer. S'occuper de son père va lui demander une force physique et mentale incroyable. Il va même en oublier ses projets et sa propre vie. De ce fait, l'évolution (ou plutôt la déchéance) des protagonistes est ici présentée habilement et subtilement. Jamais le réalisateur n'essaie de trop en mettre.
La relation entre les deux frères est, par ailleurs, traitée avec une belle profondeur. Elle représente bien les deux côtés de la médaille : garder le malade le plus longtemps possible à la maison ou le mettre dans une institution spécialisée.
Pendant les 45 premières minutes, je sentais que l'on s'égarait un peu en nous montrant Gabriel couvrir des événements aux quatre coins du globe. Cependant, avec du recul, je pense que ces quelques scènes étaient nécessaires pour bien nous présenter la situation de ce personnage. Notons, par ailleurs, que la séquence se déroulant en Afghanistan est crédible (belle reconstitution) et fort bien réalisée.
Marcel Sabourin est au sommet de son art. Il est souvent touchant, voire bouleversant. Il interprète à merveille un homme impuissant qui a perdu tous ses repères dans la vie. La scène où il retrouve sa lucidité pendant un court instant est l'une des plus émouvantes que j'ai vues cette année.
La finale est, à l'instar du reste du récit, douce, symbolique, mais étonnamment puissante.
Verdict
Avec L'Autre Maison, Mathieu Roy nous montre un portrait humain et très personnel de la maladie d'Alzheimer. En somme, son premier long métrage de fiction est une réelle réussite. Espérons qu'il répète bientôt l'expérience!
Cote : 4 étoiles sur 5
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