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Des super-canons testés en Estrie!

Un des plus brillants balisticiens canadiens, Gerald Bull, a été assassiné à Bruxelles en mars 1990 parce que ses travaux devenaient gênants pour plusieurs camps : les Américains, les Iraniens et les Israéliens. On ne sait toujours pas qui l'a fait assassiner, mais l'histoire de Gerald Bull mérite d'être contée, surtout que le développement de ses canons s'est fait ici, chez nous, en Estrie.

Gerald Bull

L’histoire de Gerald Bull n’est pas banale. Né à North Bay en Ontario, ce jeune prodige est très tôt inscrit à l’université alors qu'il n'a que 16 ans. Il se passionne pour l’aéronautique, mais rapidement on l’oriente vers la balistique, qui est la science du mouvement des projectiles. À la fin de la Seconde Guerre mondiale, le Canada, qui a collaboré avec la Grande-Bretagne sur des projets de développement de canons plus efficaces, poursuit des recherches dans le domaine de la balistique de grande envergure. On a besoin de talents et on souhaite voir le jeune Bull se diriger vers le CARDE (Canadian Armament and Research Development Establishment) où il devient un spécialiste en balistique. Probablement inspiré par les recherches nazies en la matière, il s’intéresse au développement de super-canons qui pourraient envoyer des ogives très loin et même des satellites dans l’espace. Toutefois, ses recherches prendront fin en même temps que le CARDE, projet que le gouvernement canadien abandonnera. Mais Gerald Bull n’avait pas dit son dernier mot…

Highwater dans les Cantons-de-l’Est

En 1971, Gerald Bull, alors enseignant à l’Université McGill, décide de fonder une compagnie de recherche en balistique à Highwater près de Mansonville dans les Cantons-de-l’Est, la Search and Research Corporation (SRC), afin de poursuivre ses recherches. Le secteur acheté déborde aussi sur le territoire américain de North Troy, Vermont. Comme ses travaux intéressent à la fois le Canada et les États-Unis, et qu'ils nécessitent qu’il passe d’un pays à l’autre, le Congrès américain l’autorise à avoir la double citoyenneté canadienne-américaine, fait tout à fait exceptionnel, car seuls deux autres personnes ont eu droit à ce privilège : le Marquis de Lafayette (révolution américaine) et Winston Churchill (Seconde Guerre mondiale). Il travaillera étroitement avec la CIA dans ses travaux, notamment afin d’équiper l’Afrique du Sud qui, frappée d’un embargo sur les armes par l’ONU à cause du régime de l’apartheid, ne pouvait s’équiper convenablement contre son pays voisin l’Angola, lequel était équipé par l’URSS. Durant les années 70 à 80, le SRC donnera de l’emploi à 300 personnes dans ses installations de Highwater. Des projets innovateurs et fascinants y prendront vie. La photo du canon qui apparaît en haut de l'article, prise par moi en 1990, est un bel exemple des réalisations de Bull à Highwater.

Super-canon de Gerald Bull à la Barbade

Les super-canons de Bull

Perçu par certains comme un simple marchant d’armes, Gerald Bull ambitionnait plutôt de mettre au point un moyen peu coûteux afin d’ultimement mettre des objets en orbite à l’aide d’un canon : projet HARP (High Altitude Research Project). Il aurait conçu des canons de 210 mm de diamètre, mais il considérait qu’un projectile d’un mètre serait l’idéal! Méchant morceau! Toutefois, ses travaux bifurquèrent, poussés par la CIA, vers la mise au point d’un super-canon destiné à l’Irak alors en guerre avec l’Iran de Khomeni. Construit à flanc de montagne (donc fixe), il aurait fait près de 300 m de long et aurait pu atteindre des cibles jusqu’à 1500 km de distance! Ce canon était en voie de réalisation lorsque Bull fut assassiné le 22 mars 1990 à Bruxelles. On croit que le Mossad (services secrets israéliens) aurait voulu empêcher l’Irak de posséder une arme capable d’atteindre Israël avec une ogive nucléaire tirée par un canon à la veille de la guerre du Golfe de 1991.

Histoire méconnue

Plus de vingt ans se sont écoulés depuis la disparition tragique de ce scientifique contesté. Son rêve, il est vrai, s’apparentait davantage à celui de Jules Vernes (voir De la Terre à la Lune) qu’à celui de la NASA… Il y a quelques semaines, sa famille est sortie de l’ombre afin de rétablir sa réputation et s’est associée au Musée des communications et d'histoire de Sutton dans le but de présenter une exposition qui relate cette histoire inédite et méconnue, laquelle s’est tenue en grande partie chez nous, en Estrie. J’ai bien l’intention d’aller y faire un tour!

Liens :

http://thecanadianencyclopedia.com/index.cfm?PgNm=TCE&TCE_Version=F&ArticleId=F0001095&MenuClosed=0

http://fr.canoe.ca/divertissement/arts-scene/nouvelles/2013/10/03/21168431-qmi.html

http://fr.wikipedia.org/wiki/Gerald_Bull

Sources photos : lessignets.com, gadzetomania.pl, collection Éric Doyon

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