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Ça y est, je viens de me faire un tour de rein!

En tant que kinésiologue-kinésithérapeute, je peux dire que j’en entends tous les jours des histoires et de toutes les sortes. Il ne se passe pas un jour sans que j’entende au moins quelque part autour de moi un de ces fameux classiques comme « je me suis déplacé un nerf » ou « j’aurais besoin de me faire ramancher ». À qui la faute? À plusieurs facteurs. Entre autres au folklore entourant les petits bobos et les remèdes ancestraux, aux ramancheurs qui n’ont aucune formation, mais qui, apparemment, savent guérir tous les maux, jusqu’aux expressions populaires maintenues en vue par notre culture riche en informations déformées. Dans mon désir perpétuel d’informer les gens sur l’anatomopathologie, j’ai décidé d’écrire un petit article sur ces mythes et expressions populaires qui caractérisent les maux qui nous entourent.

À LIRE AUSSI: Exercices à faire et ceux à éviter pour le mal de dos

« J’ai un nerf de déplacé. »

Le fameux nerf déplacé… on dirait que ça se déplace tout seul comme si une personne sur deux avait un défaut de fabrication. Je vous rassure tout de suite, les nerfs ne se déplacent pas aussi facilement que vous le croyez. Essayez de visualiser le système nerveux un peu comme un embranchement de fils électriques qui parcourent le corps en se faufilant entre les différentes structures anatomiques (ex. : os) pour se rattacher aux différents tissus qu’ils innervent (ex. : muscles). Ainsi, vous comprendrez qu’il sera difficile de littéralement « déplacer » un nerf, du moins pas comme on pourrait le croire. Malgré qu’il y ait quelques nerfs dans le corps humain qui soient disons plus « exposés », comme le nerf ulnaire dans le creux du coude qu’on cogne facilement, il est tout de même rare qu’un nerf soit significativement en dehors de son trajet naturel. Un nerf sera plutôt comprimé ou irrité par un phénomène, comme une contracture musculaire.

De plus, ce que les clients me pointent comme étant le « supposé » nerf déplacé dans la région du cou est en fait un tendon musculaire. J’ai d’ailleurs remarqué que beaucoup de gens confondent les tendons et les nerfs. Au niveau du cou, il s’agit souvent de l’élévateur de la scapula, un muscle impliqué dans la posture du cou et de l’épaule, et qui est responsable de bien des douleurs cervicales et de maux de tête. Vous comprendrez donc que le « thérapeute » qui, d’un petit coup vif, fait réagir ce muscle d’une pression des doigts et qui vous soulage temporairement a tout simplement levé la tension du muscle en question. Le fait que ce dernier vous rassure par la suite en vous disant qu’il vient de vous replacer votre nerf ne fait que prouver son manque de compétence et de connaissance. Ça ne veut pas dire que ce qu’il a fait est mal. En fait, n’importe quelle technique de traitement qui travaille les tensions musculaires (point pression, étirement, massage ou mobilisation) aura un effet bénéfique. En contrepartie, il y a peu de chances qu’il ait « replacé » quoi que ce soit et vous devez être conscient que vous remettez votre sort entre les mains de quelqu’un, qui lui, n’est pas conscient de l’impact exact de ses gestes thérapeutiques.

« Je me suis démanché de quoi. »

Tout comme les nerfs, les vertèbres de la colonne ne se déboîtent pas si facilement. Du moins, si ça arrive, croyez-moi, vous le saurez automatiquement et c’est en ambulance que vous vous retrouverez! La composition du système vertébral comprend une multitude de structures telles que les ligaments, les muscles, les fascias et les surfaces articulaires qui lui permettent d'assurer sa stabilité. C’est pour ça d’ailleurs qu’on appelle ça une colonne! Par contre, il peut effectivement y avoir subluxation, ou ce que les chiropraticiens appellent un DIM (dérangement intervertébral mineur). Ce que ça veut dire, c’est qu’il y a une légère désarticulation de la jonction articulaire. Comme si au lieu d’être parfaitement emboîtées, les vertèbres avaient bougé légèrement les unes par rapport aux autres à la suite des forces de traction exercées par les muscles environnants. Ce n’est pas dramatique et c’est loin d’être rare. En fait, personne n’est parfaitement droit et ce n’est d’ailleurs pas ce qui est important. La preuve, c’est que ça ne vous empêche pas de fonctionner la plupart du temps et qu’il se peut fort bien que vous entendiez un petit « clic » de temps à autre lorsque vous faites un mouvement, signe qu’il y a eu décompression articulaire. Ce qui s’est alors passé, c’est que les surfaces articulaires qui étaient plus en contact d’un côté se sont soudainement décollées, ce qui a créé ce bruit de dilatation (un peu comme un verre sous vide placé à l’envers qu’on soulève après quelques minutes).

Il faut donc comprendre trois choses : 1) un os ne bouge pas par lui-même, car il est inerte; 2) la posture et les contractures comptent pour beaucoup dans la présence d’éventuelles douleurs; 3) ce n’est pas la recherche de la perfection architecturale de la colonne qui compte, mais bien l’intégrité de ses fonctions (bouger ou se stabiliser). C’est pour cela que certaines personnes collectionnent les rendez-vous de thérapeutes qui se contentent de les faire « craquer » ou que d’autres diront qu’elles ont le dos « fragile ». Ce sont souvent ces mêmes personnes qui ont aussi peur de se « redémancher » quelque chose après un traitement, tel un château de cartes qui s’écroule. À moins d’une condition particulière, comme une hyperlaxité ligamentaire, votre dos ne se démantibulera pas aussi facilement que vous pouvez le penser. Il est de votre responsabilité cependant de comprendre les postures en cause et de préserver vos fonctions avec une pratique quotidienne d’exercices adaptés.

 « J’ai le dos barré. »

La sensation d’avoir le dos soudainement « bloqué » vient encore une fois des contractures musculaires latentes que vous maintenez de par vos habitudes quotidiennes. C’est pourquoi ces épisodes sont irréguliers et récurrents (ils partent et reviennent), car ils dépendent de facteurs environnants (ex. : quelque chose que vous avez fait dernièrement ou une tâche mal exécutée). S’il s’agissait d’une réelle pathologie articulaire, la douleur serait présente tout le temps et ne s’estomperait pas, comme c’est le cas pour les maladies rhumatismales (arthrite). Par ailleurs, les vrais blocages articulaires surviennent surtout lors d’une chute ou d'un impact importants et sont plus aigus que chroniques.

Votre corps s’adapte tous les jours aux stimuli auxquels il est exposé. Ce dernier tente de fonctionner au mieux de ses capacités, lesquelles seront affectées et auront diminué avec le temps si vous ne les avez pas entretenues. Pour ce faire, il crée ce qu’on appelle des contractures musculaires. Une contracture est un état dans lequel le muscle conserve une certaine tension résiduelle au repos afin de permettre des compensations ou de protéger des structures. Cette adaptation entraîne malheureusement souvent des pertes de mobilité et si elles sont maintenues à long terme, elles entraîneront à leur tour des contraintes mécaniques. Ce qui se passe donc la majorité du temps lorsque vous « barrez », c’est que le corps a fait face à une situation qu'il n’a pas été en mesure de traiter convenablement et a tenté de se protéger ou a tout simplement réagi avec un spasme musculaire. Comprenez bien que le spasme est momentané (réponse aigüe) alors que la contracture, elle, est permanente et représente en fait la cause latente de cette réaction éphémère que vous expérimentez. La meilleure chose à faire est souvent de tenter de diminuer une fois de plus la tension musculaire par des étirements légers et spécifiques aux muscles cibles, que vous devriez d’ailleurs exécuter par la suite régulièrement afin de réduire les risques de récidives.

« Je me suis fait un tour de rein. »

Un rein, ça ne se retourne pas. Point à la ligne. Une fois de plus, il s’agit plus souvent qu’autrement de contractures musculaires dues à des pertes de qualités fonctionnelles (ex. : flexibilité, proprioception), des mouvements répétitifs ou de mauvaises attitudes posturales. Les gens qui disent avoir mal « aux reins » ont en fait souvent des contractures aux muscles dentelé postéro-inférieur et carré des lombes, qui se trouvent dans la région du bas du dos. Je le prouve à mes clients chaque fois en leur montrant comment la douleur disparaît instantanément dès qu’on lève les tensions de ces muscles vulnérables aux rétractions (contractures).

« Je suis enflé dans le dos. »

Un site qui est sujet à un processus inflammatoire sera rouge, chaud et surtout « mou », car il y a présence de liquide (œdème). Or, dès qu’on vérifie, la plupart des gens remarquent eux-mêmes que la région cible est plutôt « dure » et résistante (raide). Qu’est-ce que ça veut dire à votre avis? Eh oui, qu’il s’agit encore d’une contracture musculaire! Ce qui porte à confusion, c’est d’une part que tout le monde blâme l’inflammation dès qu’il y a un problème (c’est si facile!) et, d’autre part, qu’un muscle contracturé prend de la rondeur et paraît plus « gros » conséquemment au rapprochement des fibres musculaires. Du coup, les gens remarquent une douleur et un bombement, puis concluent que c’est de l’inflammation et s’empressent de recourir aux anti-inflammatoires au lieu de faire des étirements pour résoudre le problème.

Comment avoir la preuve que l’inflammation n’est pas la cause première? Vous remarquerez qu’une fois les effets antidouleur de la pilule dissipés, le problème refera surface sous peu… et même s’il y avait inflammation, il ne s’agit que du symptôme et non de la cause primaire. Votre meilleure arme est encore une fois de faire des étirements légers et spécifiques. À ce sujet, pour des exemples sécuritaires et valides d’exercices que vous pouvez faire à la maison, je vous suggère le livre de référence Les exercices qui vous soignent aux Éditions de L’Homme.

« J’ai fait un faux mouvement. »

Qu’est-ce qu’un « faux » mouvement? Un mouvement malhonnête déguisé en « vrai » mouvement qui avait comme objectif de vous blesser? Enlevez cette idée de votre tête tout de suite, car un « faux » mouvement, ça n’existe pas. Arrêtez donc de blâmer le mouvement, car ce n’est pas à lui que revient la faute, c’est à vous! Sans que vous ne vous en rendiez réellement compte, c’est votre réponse à la situation qui a fait défaut. Ce qui s’est passé, c’est qu’il y eu un manque au niveau du système nerveux (signal) pour coordonner le mouvement ou encore un manque au niveau des fonctions mécaniques requises pour exécuter ce dernier, ce qui a conduit à une dysfonction et, par conséquent, à une mauvaise réponse. En tant qu’opérateur, vous souffrez en fait des conséquences d’une mauvaise utilisation de votre « machinerie ». C’est pourquoi il est aussi important de préserver ses amplitudes de mouvement fonctionnelles par des exercices d’étirement et d’entretenir ses capacités motrices par des exercices proprioceptifs. Si vous avez à exécuter des tâches précises, il est de votre responsabilité d’apprendre les bons patrons moteurs qui permettent d’optimiser l’exécution de la tâche en question ou du moins de la réaliser avec le moins de contraintes mécaniques possible.

J’espère que ce texte vous aura instruit ou rassuré et que je ne vous aurai pas trop perdu dans mes explications parfois plus complexes. Il y a sûrement encore une foule d’expressions que je n’ai pas soulignées ici, mais pour le moment, je vais m’arrêter là et au besoin, je les aborderai dans un article futur…
 

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