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Un démon a-t-il tué au Connecticut?

La défense pour possession démoniaque n’existe pas au sein du Code criminel. En fait, lorsqu’on parle de personnes qui n’avaient pas conscience de leurs actes et de la gravité de ces derniers au moment de commettre un crime, on utilisera la défense de non-responsabilité criminelle pour cause de troubles mentaux. Or, cela ne veut pas dire que des avocats n’ont pas tenté de plaider la possession pour faire acquitter l’un de leurs clients. À preuve, voici l’histoire réelle d’un meurtre dont on a tenté d’innocenter son auteur parce qu’il aurait été possédé par un démon.

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Les premiers signes de possession

L’année 1980 devait être des plus normales pour Arnie Johnson et sa fiancée Debbie Glatzel. En effet, ces derniers menaient une vie des plus paisibles dans le Connecticut et mettaient en place leur vie commune. Or, très rapidement, les choses tournèrent au cauchemar alors que d’étranges phénomènes ont commencé à se produire dans la maison des Glatzel.

Le premier témoin de ces actes surnaturels fut David, le jeune frère de Debbie. Selon Arnie et Debbie, les phénomènes ont débuté peu après qu’ils aient demandé à David d’aller nettoyer la chambre des maîtres de la maison. Ayant commencé sa besogne, David leur a rapidement signifié qu’il ne retournerait pas dans la chambre. Effrayé, il mentionne à sa mère, sa sœur et le fiancé de celle-ci qu’un homme vêtu d’un chandail et d’un jeans apparaît, le poussant et le terrifiant. Croyant qu’il se sert de l’apparition pour éviter d’effectuer sa corvée, ils font fi des peurs de l’enfant.

Au fil des jours, Glatzel et Johnson réalisent que David ne mentait pas. Eux-mêmes sont confrontés à l’apparition de cet homme, qui menace de s’en prendre à la famille s’ils continuent de vivre dans cette maison. Quant à David, il semble être la cible des attaques les plus virulentes de l’apparition. En outre, il rapporte que l’homme se transforme en bête, qu’il lui parle latin et qu’il menace de lui voler son âme. Encore plus inquiétant, l’enfant est en proie à des cauchemars ainsi qu’à des changements comportementaux étranges. Des marques dont on ignore l’origine recouvrent aussi sa peau. La terreur fait place à la panique chez les Glatzel, si bien que Debbie demande à Arnie de venir emménager chez eux.

L’implication des fameux Warren

Malgré la confusion, la famille est sûre d’une chose : un esprit démoniaque rôde dans la maison. Les parents de Debbie et David font donc appel à un prêtre de l’Église catholique, qui accepte de bénir la demeure. Or, plutôt que de calmer les phénomènes, ceux-ci s’amplifient. Les visions de David doublent et de grandes égratignures lacèrent la porte d’entrée de la maison.

Afin de se débarrasser de ces phénomènes, la famille pense quitter la demeure. Cela ne fait que mettre davantage en colère « l’entité », qui s’en prend violemment à David. Alors que ses visions n’avaient lieu que le soir et la nuit, elles se matérialisent maintenant le jour. Un membre de la famille doit aussi demeurer éveillé la nuit afin de surveiller l’enfant, qui est en proie à des crises pouvant l’amener à effectuer des redressements assis très rapides pendant 30 minutes.

Désespérés, les parents consultent le prêtre ayant béni la maison. Ce dernier leur parle du célèbre démonologue Ed Warren et de sa femme clairvoyante Lorraine, qui ont notamment enquêté sur le cas d’Amityville (et dont on narre l’une des enquêtes dans le populaire film La Conjuration). Prenant contact avec eux, les Warren acceptent d’aider la famille. Dès leur arrivée, Lorraine leur mentionne voir un nuage de brume noire autour de David, probable indication d’une présence démoniaque autour du garçon. Debbie mentionne aux Warren qu’elle et sa mère ont été témoins d’agressions commises sur David, dont des coups portés par des mains invisibles ayant laissé des marques rouges sur le cou de l’adolescent. Pire, raconte Debbie, David est pris de violents spasmes et de convulsions depuis quelque temps. Il lui arrive aussi de parler des langues inconnues, de feuler, de jurer et de réciter au hasard des passages de la Bible ainsi que du poème Le Paradis Perdu. Le garçon a aussi commencé à faire l’école buissonnière et a pris 60 lb en un rien de temps.

Les exorcismes mineurs et le transfert de possession

À la suite de leur enquête, Ed et Lorraine Warren concluent que David est victime de multiples possessions. Selon Ed, pas moins de 43 démons ont élu domicile dans le corps de l’enfant. Afin de les extirper, ils procèdent à trois exorcismes mineurs conduits par des prêtres (que l’Église réfute encore aujourd’hui). Au cours de ces derniers, Lorraine certifie que David a lévité, a cessé de respirer et a même prédit l’événement qui s’avérerait macabre pour la famille. Ces exorcismes n’ayant rien donné, les Warren contactent les policiers et les préviennent que la situation de la famille Johnson commence à devenir très dangereuse. Entre-temps, les parents consultent des psychiatres, qui déclarent que l’enfant est tout à fait normal au niveau psychique, si ce n’est un léger trouble d’apprentissage.

Or, désirant sauver son beau-frère, Arnie Johnson n’a pas écouté l’un des conseils des Warren. En effet, ils ont mentionné au jeune homme qu’il ne devait pas converser avec le ou les démons ayant pris possession de David et qu’il ne devait surtout pas le provoquer, ce qu’il ne fit pas. En fait, il intima à un démon de prendre possession de son corps afin de libérer David, lui ouvrant ainsi la porte pour un transfert de possession.

Un peu plus tard, le démon en question aurait pris possession d’Arnie, le forçant à conduire sa voiture puis à foncer dans un arbre. S’en sortant indemne, Arnie retourna à la maison des Glatzel et se rendit face à un puits où le démon aurait élu résidence. Des aveux de l’homme, ce serait la dernière rencontre avec le démon durant laquelle il était lucide. Après l’avoir regardé dans les yeux, il aurait été totalement possédé par l’entité, n’ayant plus le contrôle sur ses gestes et n’ayant plus aucun souvenir de ces derniers.

Le meurtre d’Alan Bono

Malgré la « possession » d’Arnie, la condition de David poursuivit sa détérioration. N’en pouvant plus de ce climat malsain, Debbie et Arnie décidèrent de quitter, déménageant dans un appartement à côté d’un nouvel emploi que s’était trouvé Debbie. Or, peu de temps après l’emménagement, Arnie commença à agir de façon aussi étrange que son beau-frère. En outre, Debbie rapporta que son fiancé entrait en transe, qu’il hurlait et qu’il avait des hallucinations sans jamais garder un quelconque souvenir de tout cela. Il commença aussi à avoir des démêlés avec la loi, alors qu’il s’était toujours comporté de façon exemplaire.

Le 16 février 1981, Arnie s’absente de son travail pour cause de maladie. Il se rend à l’emploi de sa fiancée avec sa sœur et Mary, la cousine de 9 ans de Debbie. Alan Bono, l’employeur de Debbie et propriétaire de l’appartement du couple, emmena le groupe dans un bar local et se mit à boire beaucoup d’alcool. Puis, Debbie emmena les filles chercher une pizza, mais insista pour retourner à son lieu de travail, anticipant que quelque chose tournerait mal entre son conjoint et son employeur.

L’intuition de la jeune femme ne la trahit pas. Bono devint agité et prit Mary, refusant de la laisser partir. Arnie lui ordonna de la libérer et Debbie tenta de calmer le jeu en se plaçant entre les deux hommes. Fortement intoxiqué, Bono n’obtempéra pas. Soudain, Arnie cria « comme un animal », sortit un couteau de 5 po de l’une de ses poches et poignarda à plusieurs reprises Bono. Ce dernier mourut quelques heures plus tard, victime de profondes lacérations, dont une qui partait de son estomac jusqu’à la base de son cœur. Arnie fut appréhendé à environ trois kilomètres du lieu du meurtre et fut immédiatement placé en détention au Centre Correctionnel de Bridgeport.

 

Le procès et le « buzz » médiatique

Le lendemain du meurtre, Lorraine Warren contacta la police de Brookfield afin de les informer qu’Arnie Johnson était possédé lors de la commission du meurtre. De plus, les Warren attirèrent l’attention des médias en leur mentionnant que l’homicide serait expliqué à travers un livre et un film en préparation.

Le procureur d’Arnie ne sachant quoi plaider pour cette cause, il décida d’aller en Europe pour consulter deux confrères ayant fait face à des situations similaires. Il envisagea aussi de faire témoigner des spécialistes en exorcisme et menaça de contraindre les prêtres ayant supervisé les exorcismes du jeune David à témoigner s’ils refusaient de coopérer.

Le 28 octobre 1981, le procès d’Arnie Johnson s’ouvrit. Son avocat mentionna qu’il utiliserait une défense de non-responsabilité criminelle pour cause de possession. Le juge présidant la cause rejeta la requête, mentionnant qu’une telle défense n’existera jamais dans une cour de justice et que cela serait « puéril et contre la science d’accorder des témoignages allant en ce sens ». La défense dut donc plaider pour la légitime défense, éliminant du même coup un verdict de non-responsabilité pour possession au jury.

Le 24 novembre, après 15 heures de délibérations, le jury conclut qu’Arnie Johnson était coupable de meurtre au premier degré. Il fut condamné à une peine de 10 à 20 ans d’emprisonnement, mais n’en purgera que cinq au total.

 

La controverse ayant suivi le procès

À la suite du procès, une grande controverse éclata concernant les circonstances du meurtre d’Alan Bono. En effet, le fait qu’un livre et un film soient déjà en production ne plut pas à tous. La production du film fut d’ailleurs stoppée, mais celle du livre suivit son cours. C’est ainsi qu’en 1983, The Devil in Connecticut de Gerald Brittle fut publié avec la collaboration de Lorraine Warren. Les profits, assura Lorraine Warren, devaient être distribués avec la famille Johnson. Cette dernière reçut 2 000 $ de l’éditeur.

En 2006, lors d’une nouvelle publication du livre, les frères David Glatzel et Carl Glatzel Jr. déposèrent une poursuite contre les auteurs et éditeurs du livre pour « violation de droit à la vie privée, diffamation et affliction intentionnelle d’une détresse émotionnelle ». En outre, Carl a mentionné que certains passages du livre indiquaient qu’il avait abusé de membres de sa famille, ce qu’il nie totalement encore aujourd’hui.

Carl a également affirmé que toute cette histoire de possession avait été concoctée par les Warren afin d’exploiter la famille, plus particulièrement l’état mental fragile de son frère. En outre, il mentionne que son frère avait de graves difficultés mentales et que les Warren ont empêché qu’il reçoive les soins appropriés à son état. Il a aussi déclaré que le livre le dépeint comme quelqu’un de mauvais simplement parce qu’il ne croyait pas aux conclusions paranormales des Warren. Pire, il certifie que les Warren leur ont promis que l’histoire les rendrait millionnaires et que l’argent pourrait les aider à faire sortir Arnie de prison. Un livre intitulé Alone Through the Valley, dans lequel Carl décrit les événements, la supercherie des Warren et les répercussions que tout cela eut sur sa vie, est en écriture.

En ce qui a trait à Lorraine Warren, son mari étant décédé, elle s’est défendue quant aux allégations de Glatzel Jr. Elle mentionne que les six prêtres ayant mené les exorcismes ont confirmé la possession du jeune David et que tout ce qu’elle a raconté est véridique. Arnie Johnson et Debbie Glatzel appuient Lorraine Warren dans ses dires et mentionnent que les frères n’ont voulu intenter une poursuite « que pour des questions monétaires ».

Gerald Brittle a, quant à lui, mentionné n’avoir écrit ce livre que « parce que la famille voulait que l’histoire soit racontée ». Il certifie posséder plus d’une centaine d’heures d’entrevues avec les différents acteurs de cette situation et que ces derniers ont signé pour approuver les faits rapportés dans le livre comme étant véridiques avant que celui-ci ne soit envoyé pour impression.

Et vous, pensez-vous qu’un démon ait pu être à l’origine d’un meurtre au Connecticut ou bien la psychiatrie pourrait-elle davantage expliquer tout cela?

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