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Tueurs de masse : compréhension de l’incompréhensible

Le jeudi 19 juillet 2012 Des millions de fans du chevalier noir se préparent à visionner le dernier chapitre de la trilogie ayant fait renaître leur héros qui, avant de tomber entre les mains de Christopher Nolan, dépérissait au cinéma. La majorité de ces amateurs a pu voir le film qu’elle attendait depuis des mois,…

Le jeudi 19 juillet 2012
Des millions de fans du chevalier noir se préparent à visionner le dernier chapitre de la trilogie ayant fait renaître leur héros qui, avant de tomber entre les mains de Christopher Nolan, dépérissait au cinéma. La majorité de ces amateurs a pu voir le film qu’elle attendait depuis des mois, puis en discuter par la suite avec ses proches. Or, dans un cinéma de la petite localité d’Aurora, au Colorado, un peu plus d’une dizaine de personnes n’auront jamais la chance de partager leur opinion sur cette production cinématographique, tandis que des dizaines d’autres auront été marquées à jamais par l’horreur de ce qui devait être une fin de soirée plaisante. Une horreur provoquée par James Holmes, présumé plus récent tueur de masse aux États-Unis ayant fait tomber sous ses balles 12 personnes et en ayant blessé près d’une soixantaine d’autres lors de la projection de la première du film Batman : L’ascension du Chevalier Noir.

Un geste explicable?
L’une des premières questions que l’on se pose en ayant vent d’une tuerie comme celle d’Aurora est : pourquoi quelqu’un a-t-il fait cela? Comment un être humain peut-il en venir à abattre des dizaines de personnes innocentes? Pour la majorité d’entre nous, un tel geste est incompréhensible puisque incompatible avec ce que l’on est, ce que l’on ressent et ce que l’on fait. Certes, nous ressentons tous de la colère et vivons des situations générant beaucoup de frustration en nous, mais jamais au point de commettre des boucheries d’une telle amplitude. C’est pourquoi plusieurs d’entre nous sommes aussi bouche-bée qu’éberlués lorsque de tels gestes sont commis. Or, ces crimes peuvent tout de même être expliqués. Certes, jamais nous ne saurons exactement pourquoi ils sont exécutés, mais certaines similitudes entre ces tueries permettent de tracer un profil de leurs auteurs et ainsi parvenir à une explication qui, bien entendu, ne sera jamais totalement complète, mais qui peut tout de même nous guider dans notre exercice de compréhension de tels massacres.

Le mal de la sociopathie
Les tueurs de masse (à ne pas confondre avec les tueurs en série), comme Kimveer Gill ou Marc Lépine, sont généralement des individus ayant beaucoup de difficulté à s’adapter à la vie en société. Ressentant un malaise profond devant leur inhabilité à se conformer aux règles sociétales, ces personnes se referment sur elles-mêmes et deviennent ainsi très introverties. Lorsque vous les croisez sur la rue ou dans le couloir d’un immeuble d’habitation, ils ne paraissent pas différents des autres et sont même plutôt banals. Oubliez les clichés des personnes regardant par terre et ayant des tics incontrôlables donnant l’impression qu’ils sont fous, cela n’est que pour Hollywood. Dans la réalité, ce sont des personnes qui, certes, fonctionnent mal en société, mais qui n’en donnent pas nécessairement l’impression. Ainsi, plusieurs tueurs de masse peuvent être qualifiés de sociopathes plutôt que de psychopathes. Ce ne sont pas toujours des individus narcissiques et antisociaux comme la majorité des psychopathes, mais plutôt des personnes ayant de la difficulté à vivre en société et accumulant beaucoup de frustration face à celle-ci.

Ces sociopathes accumulent, accumulent et accumulent de plus en plus de colère. Plus le temps passe et plus ils vivent d’échecs par rapport à leurs efforts de conformité, plus ils entretiennent cette idée que la société n’est pas un monde dans lequel ils peuvent vivre et s’épanouir. Par le fait même, beaucoup de tueurs de masse ont des cibles très précises représentant leur malaise et la source de leur désarroi. Par exemple, dans le cas de Kimveer Gill, il s’agissait des gens bien nantis et, possiblement, de ceux entretenant des relations amoureuses puisqu’il avait beaucoup de difficulté à entrer en relation avec le sexe opposé. Pour Marc Lépine, ce sont les femmes, qu’il considérait comme étant un obstacle à son accès aux études supérieures. Pour les deux auteurs du massacre de Colombine, leurs victimes étaient des étudiants de leur école puisqu’ils avaient été ridiculisés par leurs pairs. Et pour Valery Fabrikant, cet ancien professeur de l’Université Concordia, ce sont d’anciens collègues qui, dans son esprit, lui avaient volé ses recherches et faisaient tout pour lui mettre des bâtons dans les roues dans la progression de sa carrière. Ainsi, les victimes des tueurs de masse ne sont généralement pas choisi au hasard puisqu’elles sont l’illustration de leur malaise et donc, l’objet de leur vengeance.

Des gestes prémédités, mais pas toujours contrôlés
Les boucheries des tueurs de masse ne sont pas des gestes précipités et exécutés sur un coup de tête. Généralement, ils sont prémédités. Les tueurs savent ce qu’ils feront et comment ils le feront. Par exemple, Marc Lépine avait préparé son arme et son entrée à la Polytechnique. Il savait où il allait et, surtout, quelles cibles il viserait. Même chose pour Valéry Fabrikant ou encore pour cet étudiant coréen responsable du massacre de Virginia Tech, qui avait préparé ses outils et avait même pris soin de cadenasser les entrées et sorties de l’endroit où il se trouvait. Dans le cas de James Holmes, le fait qu’il soit entré au cinéma puis qu’il se soit rendu à son véhicule par la sortie de secours afin d’aller chercher ses armes avant de revenir dans la salle de cinéma démontre qu’il savait comment il s’y prendrait. Le choix du film n’apparaît pas étranger à cette préméditation soupçonnée. Le fait qu’il ait accumulé 6 000 balles montre également qu’il se préparait à tuer, tandis que la présence d’explosifs dans son appartement semble indiquer qu’il savait qu’il se ferait à tout le moins identifier et que les enquêteurs iraient à son appartement, ce qui aurait fait sauter l’immeuble, tuant potentiellement plusieurs dizaines d’autres personnes. Bref, les tueries des tueurs de masse sont, en règle générale, planifiées et suivent un plan déterminé au préalable.

Or, planification ne rime pas avec contrôle. En effet, si les tueurs de masse planifient, ils ne contrôlent pas tout, incluant eux-mêmes. Comme je l’ai mentionné plus haut, ces tueurs commettent généralement leurs crimes pour se venger. Or, il arrive qu’ils entrent dans des folies meurtrières dans l’exécution de ces fantasmes meurtriers, ne sachant alors plus se contrôler. Un tueur de masse voyant l’objet de son désarroi crouler sous ses projectiles peut ressentir une telle excitation et des sensations si fortes qu’il tuera davantage que prévu à l’origine simplement en raison du plaisir qu’il retire de voir sa vengeance aussi bien mise à exécution. Ces individus peuvent entrer dans états psychotiques où le contact avec la réalité est fortement ébranlé pour laisser toute la place aux émotions générées par la réalisation de leur fantasme meurtrier.

Des questions en suspens et des pistes intéressantes
Malgré tout cela, des questions demeurent sans réponse, spécialement dans le cas de James Holmes. Si les victimes des tueurs de masse font réellement un sens avec leur vécu, comment expliquer qu’Holmes s’en soit pris à de simples personnes s’étant rendues à la première de l’un des films les plus attendus de l’été? Quels sont les motifs derrière le crime de ce jeune homme de 24 ans? Ce sont des questions qui trouveront probablement des réponses au cours des prochains mois, alors que les enquêteurs creuseront la personnalité de l’individu.

Or, ce qu’il y aura d’intéressant dans le cas de James Holmes est que ce dernier est toujours en vie. Si nous pouvons tracer un portrait des tueurs de masse, ce dernier demeure sans cesse approximatif puisque, généralement, leurs auteurs se tuent ou bien font en sorte de se faire tuer (rappelons le cas de Kimveer Gill qui désirait mourir « sous une pluie de balles »). Dans le cas de Holmes, à moins qu’il ne se suicide pendant qu’il est détenu ou bien qu’il soit lui-même assassiné, des questions relatives aux tueurs de masse pourraient trouver de nouvelles réponses et les études sur ces criminels pourraient être bonifiées de nouvelles données par rapport à ce qu’il rapportera sur les motifs l’ayant conduit à commettre cette tuerie. Toutefois, cela exclut qu’il soit victime de troubles délirants à tendance mégalomaniaque, comme Fabrikant ou encore Anders Behring Breivik, le responsable du massacre en Norvège l’an dernier.

Chose certaine, la désormais tristement célèbre tuerie d’Aurora aura fait renaître le débat du contrôle des armes à feu aux États-Unis, et ce, en pleine campagne présidentielle. Ici, au Canada, rappelons que le gouvernement fédéral n’y voit pas de problème, ayant récemment aboli le registre des armes à feu…

(Photo : AP)

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